Filed under: Beauté

Il fait froid, la neige craque et, non loin, on entend le grondement de la chute à Baptiste, cachée au cœur de l'immense forêt Fernand-Boilleau. Pourtant, on se sent vite réconfortée à écouter le Montagnais Claude Boivin et l'herboriste Mélanie Sheely raconter le thé du Labrador.
Le secret des bois
Tout près des braises d'un immense feu de bois, le tandem fait chauffer une infusion de feuilles du thé du Labrador, au goût délicatement camphré, tout en pointant du doigt un humble buisson, à demi-caché par la neige. «Le thé du Labrador est une des plantes les plus connues du Grand Nord canadien,» rappelle Mélanie Sheely.
«Les Cris appliquaient ses feuilles broyées sur les blessures. Les Montagnais les employaient pour éloigner les insectes ou combattre les mycoses de la peau. Astringente, cicatrisante et antibactérienne, la plante était également utile aux coureurs de bois. Même le frère Marie-Victorin, père du Jardin Botanique de Montréal, avait noté que les Amérindiennes buvaient du thé du Labrador pour faciliter leur accouchement.»
La trouvaille de LASEVE
Interpelés, les chercheurs du Laboratoire d'analyse et de séparation des essences végétales (LASEVE), affilié à l'Université du Québec de Chicoutimi (UQAC) se sont donc penchés sur ce «thé des Esquimaux».
«Nous espérions lui trouver des vertus anticancéreuses, explique le pharmacologue et chercheur Jean Legault. Ce fut le cas pour ses branches. En ce qui concerne les feuilles, nous nous sommes plutôt aperçus que leur haute teneur en acide ursolique en faisait un antioxydant puissant, capable de combattre la formation de radicaux libres dans la peau.»
Le trésor d'une région
«Pour en avoir le cœur net, nous avons soumis le thé du Labrador au test ORAC, poursuit le chimiste André Pichette. Reconnu à l'échelle mondiale, ce test mesure la Capacité d'Absorption des Radicaux Libres d'un ingrédient (d'où son nom ORAC). Or le thé du Labrador s'est avéré être un antioxydant imbattable - 20 fois plus puissant que l'idébénone (l'actif des luxueux anti-âge Prevage), trois fois plus vigoureux que la vitamine C, et aussi plus actif que la vitamine E et l'huile de pépin de raisin (le resvératrol de Caudalie).»
L'arrivée de Lise Watier
Avertie, dès 2010 Lise Watier est donc débarquée en pleine forêt boréale, guidée par les gens de la Coopérative forestière Fernand-Boilleau - dont les fondateurs n'en reviennent toujours pas d'être passé du statut (historique) de bûcherons à développeurs de cosmétiques!
Au terme de cinq ans de recherches, la collaboration entre les chercheurs de LASEVE et les experts de chez Watier a finalement débouché sur une gamme de cosmétiques à l'extrait concentré de thé du Labrador, extrait obtenu via un procédé exclusif.
Le lancement en comptoirs
En plus d'être une exclusivité mondiale et une innovation 100% québécoise (l'extrait de thé du Labrador n'avait jamais été utilisé), les nouveaux soins agissent sur la peau de plusieurs façons en l'hydratant, en stimulant sa production de céramides, en la régénérant, en améliorant son élasticité et en réduisant l'apparence de ses ridules. Ce qui ne gâche rien, les feuilles de thé employées sont cueillies à la main, avec respect pour la forêt boréale...
Le début d'un temps nouveau
Entretemps, d'autres plantes nordiques intéressent les chercheurs du laboratoire LASEVE. «Les conifères, certains champignons et plusieurs herbes, ainsi que l'odorant foin d'odeur cachent peut-être des actifs intéressants, résume André Pichette. Les aînés autochtones sont toutefois réticents à nous dévoiler leur savoir. Par chance, une collaboration entre sciences et médecine traditionnelle paraît désormais possible grâce aux jeunes générations d'Amérindiens, moins méfiants.»
Par Micheline Lortie.
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